Le terme de mentor nous ramène à la guerre de Troie. Mentor est le nom de la personne à qui Ulysse convie l’éducation de son fils. Mentor, ayant souvent conseillé Ulysse, se voit, au départ de son ami pour la guerre, confier l’éducation de Télémaque ainsi que la régence du royaume d’Ithaque[1].
Le mentor est donc un guide, un conseiller, un homme de confiance ainsi qu’un homme de sagesse.
C’est sous ces différents aspects que le terme mentor va passer dans le langage commun, on retrouve dans la cinquième édition du dictionnaire de l’Académie française éditée en 1798, la définition suivante :
“ Mentor. s. m. Nom propre qui est devenu appellatif, et qui se dit de celui qui sert de conseil, de guide, et comme de gouverneur à quelqu’un. Il aurait besoin d’un Mentor.”[2]
Si nous devons résumer ce que nous apprend l’étymologie de ce mot, le mentor a principalement trois rôles : celui de guide, celui de conseiller et celui de précepteur. Pour cela il a besoin de deux qualités : la confiance et l’expérience (ou la sagesse).
Cette image de guide est également celle employée par OpenClassrooms pour expliquer le mentorat.
Dans son cours “Devenez mentor sur OpenClassrooms”[3], Mathieu Nebra commence justement en posant la question “qu’est-ce que le mentorat ?”.
Et il le définit comme étant un accompagnateur de l’apprenant, un guide qui connaît le chemin dans le labyrinthe de l’apprentissage (sic). Nous retrouvons bien cette idée de guide de l’élève mais aussi de sagesse, car le mentor a connaissance de la voie pour sortir du labyrinthe.
Mathieu Nebra explique tout d’abord que le mentor est un accompagnateur, présent pour aider un apprenant dans la formation en ligne.
Il part du constat que si nous pouvons apprendre une multitude de choses sur internet via des cours en ligne, pour certaines personnes “les cours ne suffisent pas”.
C’est au delà de cette limite que le mentor intervient.
Le e-learning n’est pas le seul domaine dans lequel la notion de mentor intervient.
D’après l’article du Monde intitulé “L’origine québécoise du mentorat”[4], ce système, permettant à un débutant d’être guidé par une personne expérimenté, est une tradition très présente au Canada.
Voici quelques exemples de mentorat dans différents domaines professionnels.
Nancy Laferrière est coordinatrice du projet mentorat-consultation en métier d’art.
Dans l’introduction du livre Une expérience à vivre : le mentorat | consultation en métiers d’art[5], elle justifie le mentorat en ces termes:
“ … le Conseil des métiers d’art a mis sur pied un projet de mentorat-consultation, qui visait à revaloriser les pratiques de parrainage et à faciliter le transfert des compétences à la relève en métiers d’art. Le projet voulait en outre ouvrir la voie à une nouvelle pratique professionnelle pour les artisans expérimentés…”
Nous distinguons bien deux objectifs, à savoir d’une part faciliter la transmission du savoir mais aussi proposer des nouvelles pratiques pour le mentor.
Le mentorat, dans cette explication, exprime bien la notion d’échange entre les deux protagonistes.
Dans ce même document, au travers des verbes choisis pour décrire les rôles du mentor nous comprenons que le mentorat permet la transmission de la connaissance mais aussi la création d’une relation de confiance.
Les verbes sont les suivants : aider, écouter, enseigner, confronter, encourager, inspirer, partager et offrir.
Ces rôles sont en fait inspirés du Guide pour les mentors, Québec, Les Éditions de la Fondation de l’entrepreneurship, décembre 2000, p16.
Le mentorat est présent depuis longtemps au sein des entreprises.
Il existe pléthore de livres sur le sujet, expliquant le rôle du mentor. On peut retenir la définition apportée par Etienne Saint-Jean et Stéphanie Mitrano-Méda qui explique dans Former les mentors pour entrepreneurs pour aller au-delà de la transmission d’expérience que :
“le mentorat concerne l’établissement d’une relation de soutien entre un entrepreneur novice […] et une personne expérimentée […], le dernier permettant au premier de se développer en tant que personne. […] Le mentorat se distinguerait du coaching, du tutorat ou du compagnonnage du fait qu’il est davantage orienté vers la quête de sens plutôt que l’acquisition de technique”[6].
Cette distinction est d’ailleurs essentielle, il est intéressant de l’aborder pleinement.
Ces trois termes désignent des supports à l’apprentissage. Ils ne se distinguent pas clairement par les tâches qui leur incombent mais par l’objectif à atteindre pour chaque acteur.
Le concept de coach vient directement du monde sportif. Le but du coach est d’accompagner un apprenant et de le mener vers un but à atteindre[7].
Il doit développer les compétences professionnelles d’un individu pour lui permettre d’atteindre un objectif précis.
Il n’est nullement question d’échange, de relation comme nous l’avons plusieurs fois évoqué dans le mentorat.
Le coach, à l’instar du mode sportif, est focalisé sur une performance mesurable et il est mené par un guide qui travaille pour mobiliser les compétences de l’apprenant.
Le coach, de par sa fonction, est vécu comme étant en parallèle du système d’apprentissage, il se distingue du tuteur qui en fait non seulement parti mais qui est même parfois un égal de l’apprenant.
Toujours selon Françoise Raynal, le tutorat est vu dans un temps limité, il peut être au même niveau hiérarchique que l’apprenant et il a pour objectif faciliter l’apprentissage par son expérience récente de la phase d’apprentissage ou de la spécificité du métier.
Il est positionné comme un égal et a pour fonction d’accélérer et de fluidifier l’intégration d’un apprenant.
Le mentor est un individu qui intervient comme support à l’apprentissage. Il est sollicité pour d’une part aider l’apprenant aussi bien dans l’acquisition du savoir, et d’autre part mobiliser et stimuler les compétences de développement et d’apprentissage de l’apprenant.
Si le tuteur et le coach jouent au même titre le rôle de guide, dans le mentorat existe une dimension d’échange, où le mentor transmet son expérience, sa sagesse et reçoit en retour la confiance.
Mathilde Bourdat[8] cite Baugh et Scandura et décrit le mentor comme plus expérimenté et qu’au sein d’une entreprise, il est réellement efficient s’il est en mesure de couvrir deux aspects : l’approche technique du savoir mais aussi l’approche psychologique ou relationnel qu’il se doit d’instaurer avec l’apprenant.
Pour remplir à bien sa mission, le mentor, s’il n’a pas l’obligation de posséder la totalité du savoir technique, il doit avoir une solide expérience de vécu du métier dans lequel il évolue.
S’il n’a pas l’obligation de transmettre directement la connaissance, il doit être en mesure de savoir comment acquérir cette connaissance.
Il doit également avoir de bonnes compétences cognitives car il doit être en mesure de mettre en place des stratégies d’apprentissages adaptées à son apprenant.
Il doit être empathique enfin de pouvoir créer une relation de confiance avec l’apprenant qu’il suit et qu’il guide.
Enfin, dans un système idéal du mentorat, parce que le mentor n’est pas un coach, il bénéficie également de la relation qu’il noue avec l’apprenant et en tire également un savoir.
La relation de confiance créée entre les deux acteurs permet alors également au guide d’apprendre, c’est ce qu’explique Smain Milianni dans un article publié en 2017 sur la plateforme Medium:
“…il est aussi important […], en tant que développeur, de progresser techniquement et d’apprendre de nouvelles choses. Le mentorat m’apporte aussi cet aspect, […] les élèves sont très créatifs, les projets ne se ressemblent pas tous et vous voyez souvent de nouvelles manières d’aborder un problème. Vous progressez aussi en transmettant un savoir”.[9]
Cette idée d’échange de connaissances a d’ailleurs donné un nouveau concept qu’on retrouve sous le terme de “reverse mentoring” où c’est l’apprenti qui par sa jeunesse et sa compétence digitale transmet des connaissances à un senior[10].
C’est cependant un abus de langage, un effet de mode, car si nous reprenons la définition du mentor, l’expérience n’étant pas liée à l’âge mais au temps passé sur une pratique, il est tout à fait possible qu’un jeune apprenti ait plus d’expérience digitale qu’un dirigeant actuel d’entreprise.
D’ailleurs le mentorat est assez récent en Europe, et si les Canadiens ont à plusieurs reprises écrit sur le sujet, différents guides et autres modes d’emplois, nous sommes en France, pauvres sur le sujet.
De plus, au delà du poste de mentor, c’est tout l’ensemble du dispositif d’aide à l’apprentissage qu’il faut étudier. C’est l’ensemble des fonctions attribuées plus communément aux tutorats qu’il faut évaluer pour avoir une idée claire d’un concept global de mentorat au sein d’un MOOC.
Et ce pourrait être le sujet d’un autre article.
[1] « Mentor (mythologie) ». Wikipédia, 13 avril 2017». https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Mentor_(mythologie)&oldid=136404599.
[2] « Dictionnaire de l’Académie française – 5ème Edition » p.1974 -Version téléchargeable : http://artfl-project.uchicago.edu/node/17
[3] https://openclassrooms.com/courses/devenez-mentor-sur-openclassrooms
[4] Jullien, Pierre. « L’origine québécoise du « mentorat » ». Le Monde.fr, 26 avril 2016. http://www.lemonde.fr/emploi/article/2016/04/26/un-mentorat-tres-canadien_4909182_1698637.html.
[5] Cécile Auclair, Nancy Laferrière, “Une expérience à vivre : le mentorat | consultation en métiers d’art”, p.4 Editions: Conseil des métiers d’art du Québec
[6] St-Jean, Étienne, et Stéphanie Mitrano-Méda. « Former les mentors pour entrepreneurs pour aller au-delà de la transmission d’expérience ». Revue de l’Entrepreneuriat 12, no 1 (17 juin 2014): 121‑40.
[7] Raynal Françoise. « Pédagogie, dictionnaire des concepts clés », version Ebook Kindle Emplacement 6148 – 2015, ESF Sciences Humaines
[8] « Tuteur, mentor, coach… quelques définitions ». Le blog de la Formation professionnelle et continue, 30 août 2011. http://www.formation-professionnelle.fr/2011/08/30/tuteur-mentor-coach-quelques-definitions/.
[9] Smaïne Milianni “Mon retour d’expérience sur le mentorat”, 10/08/2017 MEDIUM https://medium.com/@smaine.milianni/mon-retour-dexpérience-sur-le-mentorat-fc4460011589
[10] « Reverse mentoring » : quand les jeunes apprennent aux dirigeants ». http://www.imaginetonfutur.com/reverse-mentoring-quand-les-jeunes-apprennent-aux-dirigeants.html.
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